Claudio Morandini préfère l’obscurité à la clarté. Il est de ceux qui pensent que l’ombre, la nébulosité et l’ineffable sont préférables à l’évidence. Plutôt qu’une écriture limpide et gorgée de certitude, il privilégie les angles morts et les allusions subtiles. Sa plume créée des personnages aux contours indéfinis, flous, avec une profonde finesse. À l’image de la vie, ses histoires ne sont pas toutes tracées et ne servent pas un dessein prédéfini ; elles sont complexes, joliment tordues et imprévisibles.
L’auteur publie son premier roman en 2006, Nora e le ombre, et plonge son lecteur dans une atmosphère gothique. Aurora, petite comtesse du XIXè siècle, est victime de spectres étranges et de simulacres inexplicables. L’écrivain y explore déjà les dimensions troublantes du réel et excelle dans l’art du silence assourdissant et inquiétant.
Dans A gran giornate, l’auteur fait le récit d’un voyage comico-grotesque, celui d’hommes incomplets, chacun en quête d’un je-ne-sais-quoi énigmatique qui leur est propre. Avec ce roman, Claudio Morandini entre dans la sélection des célèbres librairies La Feltrinelli et fait partie des finalistes du prix littéraire Paradiso degli orchi. En 2013, il gagne la première édition du prix littéraire « Città di Tresbiacce », décerné par l’Institut Culturel de Calabre.
Le chien, la neige, un pied est son premier ouvrage publié en France, en 2017. Ce roman noir relate l’histoire d’un ermite qui vit dans une vallée minérale très reculée du Val d’Aoste. En plein hiver, le personnage bascule petit à petit dans la folie et engage un dialogue avec un chien. La plume de l’écrivain ne nous permet plus de distinguer le réel de l’irréel, et nous embarque au cœur d’un univers à la fois cruel et fascinant.
Dans son nouveau roman, Claudio Morandini donne vie aux pierres au sein d’une communauté montagnarde. Dans cette fable déroutante, les habitants des environs doivent faire face à des phénomènes étranges…

Dans un pays de montagnes, les habitants des villages jumeaux de Sostigno (dans la vallée) et Testagno (sur les hauteurs) sont confrontés à un phénomène pour le moins intriguant : les pierres, rocs, cailloux, gravillons et autres galets de rivière se meuvent de par une volonté qui leur semble propre. Non sans malice parfois, ou suivant la logique énigmatique d’un aléatoire complet, les mouvements et apparitions inopinées des pierres dans ces villages chamboulent de fond en comble les rituels quotidiens des villageois, qui ont dû composer avec ce nouvel état de faits.
Les maisons glissent sur leurs fondations, des éboulements sournois menacent les bêtes, certains cailloux se décalent pour pouvoir trouver une place au soleil plutôt qu’à l’ombre, le lit du torrent adjacent change brusquement de cours… les « gens de la ville » n’ont pas été longs à venir observer le phénomène. Scientifiques, géologues, mages, astronomes ou simples touristes se sont précipités pour assister à l’extraordinaire. Et en même temps, les montagnards, eux, ont dû réinventer leurs habitudes.
Claudio Morandini développe sur ce canevas un roman en forme de fable, un récit marqué au coin de l’étrange le plus déroutant, où s’articulent ensemble un humour récurrent et une angoisse sourde devant l’imprévisibilité des pierres animées.
Ce sont les villageois eux-mêmes qui forment le chœur polyphonique et bavard de la narration. Sous prétexte de remonter aux origines de l’apparition des premières pierres mouvantes, ils racontent les déboires du couple de citadins pré-retraités qui, les premiers, furent confrontés au phénomène. Et ce faisant, c’est un conte à la lisière du fantastique que Morandini nous invite à lire, une méditation fine sur ce qui se produit dès lors que notre sens du réel se voit perturbé par le surgissement de l’inexplicable – ou de l’inexpliqué (…).

Phrase d’accroche : Aussi étrange que d’Alfred Hitchcock. Avec la pointe d’humour nécessaire.

(Etonnants Voyageurs 2019)

 

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