Toujours sur ma lancée, entichée de Claudio Morandini, j’ai lu le roman qui précède son dernier : Les pierres.
Ne vous fiez pas à la couverture lugubre et au titre austère : c’est désopilant.
J’ai adoré. Pauvres Saponara ! Ils se rappelleront des villages de Sostigno et Testagno…
Le couple est en effet la plus grande victime des facéties des pierres ; c’est chez eux, dans leur séjour luxueux, que tombent principalement les pierres. Parfois fort, au point de blesser le curé venu manger chez ses paroissiens (et accessoirement bénir la maison), don Danilo. Ce personnage est absolument délectable. Surtout raconté par le narrateur, ado à l’époque des faits, qui relate les faits avec bonhomie et humour, en citant ses potes et leurs imitations des figures pittoresques du village.
Les Saponara manquent de devenir complètement fous avec ces histoires de pierres qui pleuvent chez eux, ou se déplacent, ou grossissent. Le village s’en émeut aussi, curieux, vaguement méprisant pour le couple qui aurait attiré le mal (ils sont nouveaux dans le village et ont fait construire une belle maison sur une ancienne ruine) ; bientôt c’est le défilé chez eux, chacun voulant observer la malédiction et goûter au malheur d’autrui. Jusqu’à ce qu’il touche aussi les bêtes lors d’un éboulement terrible.
Le lecteur est partagé entre l’envie de percer le mystère, une empathie pour le couple torturé par les mouvements incompréhensibles des pierres et des accès d’hilarité quand les comportements des uns et des autres deviennent franchement grotesques.

Ce que j’aime avec cet écrivain, c’est surtout ces passages à l’imparfait où il croque les agissements répétitifs des villageois, les habitudes, les tics, qui s’entassent pour former une chronique d’une communauté ni plus sotte ni plus maligne qu’une autre, mais qui agit plutôt que de réfléchir, pressée de revenir à la normale, si tant est que cela soit jamais arrivé (la normalité). Tout le monde suit sa petite folie douce, et s’accommode comme il peut avec les caprices de la montagne.
Une belle fable sur l’humanité, bien démunie devant le minéral ! Devant l’inexplicable… et la religion n’est pas d’un grand secours avec ce pauvre don Danilo, qui en perd même son appétit.

Lisez Claudio Morandini, franchement, c’est beau, énigmatique et drôle.

(Mme Pastel)

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